À Saint-Etienne déjà, la Cartonnerie est une vaste friche atypique, un espace inhabituel : le dispositif de dépollution lui donne des airs de laboratoire à ciel ouvert. Nous y menons de nombreuses expérimentations lors de chantiers créatifs qui façonnent le site et participent de sa transformation. Le jeu émerge comme sujet de recherche-action : nous partons à l’abordage des espaces de jeu de la ville, découvrant les aires standardisées et les usages non maîtrisés.
Les thématiques du jeu et de la standardisation des espaces publics urbains deviennent des fils rouges de l’action collective. L’historien néérlandais Johan Huizinga développe sa théorie dans un livre célèbre «Homo Ludens », où il affirme que la fonction du jeu est dans la culture. Il le considère comme forme de vie, comme forme d’activité, comme forme pourvue de sens, comme fonction sociale. Là où le jeu semble relever de l’inutile, Huizinga nous révèle toute son importance au cœur de l’apprentissage des pratiques sociales, de l’être ensemble, comme « facteur fondamental de tout ce qui se produit au monde». Le jeu, communément assigné à l’enfance, renvoie à ce qui est inoffensif, non sujet à polémique, or c’est un véritable enjeu de société qui permet de re-questionner les codes et les normes, et la dimension politique de la prise en charge de ce qui relève du «jeu» par ceux qui font la ville. Pour Carton Plein, la conception de dispositifs de jeu dénormés devient support de nouvelles créations, d’imaginaires et induisent de nouvelles aménités des espaces.
Riches de ces réflexions nous imaginons un projet international, Terrain de jeu import export qui nous conduit à Bruxelles, en Colombie, puis en Tunisie avec les danseurs citoyens et le collège Théodore Monod de Bron. Des expériences inoubliables, qui permettent de questionner encore l’espace public, les aménagements, les usages…